Quelques beaux textes, drôles, émouvants, intelligents, gais, profonds, que j'aime particulièrement


 

 

 

DE MIHAI EMINESCU

Que je voudrais revoir le val où je suis né
Ce val éclaboussé par son ru de cristal ;
Revoir ce que jadis j'ai tant et tant aimé,
Les ténèbres du bois, romantique dédale ;

Revoir les chaumières nichées dans la vallée
Sommeillant dans le calme et la paix bucoliques
Jouissant en secret de la simplicité,
Des rêves mystérieuses, des murmures lyriques.

Que je voudrais avoir un tout petit chez moi
Calme dans ma vallée zigzaguant dans les prés
Revoir le mont dressé tout au-dessus des bois
Le front enveloppé de brumes, de nuées.

Que je voudrais revoir les grands champs verdoyants
Tisser le voile blanc de mes jeunes années,
Ces champs penchés un jour sur mes chuchotements,
Qui me virent jouer et souvent folâtrer.

 

Lorsque le soir descend, j’aime entendre les vagues
Expirer sur la grève avec des sanglots vagues,
Tandis qu’un rayon pâle égaré dans les cieux
Mêle son reflet clair au bleu triste des ondes
Et brode un ourlet d’or sur les nappes profondes
Qui jettent leur chanson dans l’air silencieux.

J’aime entendre le vent qui s’irrite ou qui pleure
Et qui parle dans l’ombre aux branches qu’il effleure
D’un baiser qui les fait frémir et s’agiter ;
J’aime écouter, pensif, la voix subtile et douce
D’un insecte azuré qui dit aux brins de mousse
Ce que nul être humain ne saurait répéter.

J’aime entendre le chant limpide de la source
Qui sur un lit de sable accélère sa course
Et s’enfuit vers un but qu’elle ne connaît pas.
J’aime entendre le bruit superbe du tonnerre,
Lorsque du haut du ciel il s’adresse à la terre
Qui l’écoute soumise et tremble à ses éclats.

J’aime écouter, la nuit, tout seul devant l’espace,
Le doux bruissement du silence qui passe
Et la vague chanson qui s’échappe du ciel,
Mystiques entretiens des sphères suspendues,
Comme des lampes d’or, aux mornes étendues
Où le froid et la nuit ont leur règne éternel.

Oh ! que l’homme apprendrait de choses merveilleuses
S’il percevait le sens des voix mystérieuses
Qu’il entend s’élever à chacun de ses pas !
Mais cet hymne sacré que chante la nature
Est pour l’esprit humain d’une essence trop pure ;
Il peut le pressentir, il ne le comprend pas.

Alice de Chambrier


Il faut vivre

Il faut vivre, l'azur au-dessus comme un glaivePrêt à trancher le fil qui nous retient deboutIl faut vivre partout, dans la boue et le rêveEn aimant à la fois et le rêve et la boue

Il faut se dépêcher d'adorer ce qui passeUn film à la télé, un regard dans la courUn cœur fragile et nu sous une carapaceUne allure de fille éphémère qui court

Je veux la chair joyeuse et qui lit tous les livresDu poète au polar, de la Bible à VermotM'endormir presque à jeun et me réveiller ivreAvoir le premier geste et pas le dernier mot

Étouffer d'émotion, de désir, de musiqueÉcouter le silence où Mozart, chante encoreAvoir une mémoire hypocrite, amnésiqueRéfractaire aux regrets, indulgente aux remords

Il faut vivre, il faut peindre avec ou sans paletteEt sculpter dans le marbre effrayant du destinLes ailes mortes du Moulin de la GaletteLa robe de mariée où s'endort la putain

Il faut voir Dieu descendre une ruelle morneEn sifflotant un air de rancune et d'espoirEt le diable rêver, en aiguisant ses cornesQue la lumière prend sa source dans le noir

On n'a jamais le temps, le temps nous a, il traîneComme un fleuve de plaine aux méandres moqueursMais on y trouve un lit et des chants de sirènesEt un songe accroché au pas du remorqueur

Jamais ce qui éteint, jamais ce qui dégoûteToujours, toujours, toujours, ce qui fait avancerIl faut boire ses jours, un à un, goutte à goutteEt ne trouver de l'or que pour le dépenser

Qu'on s'appelle Suzanne, Henri, Serge ou que sais-jeQuidam évanescent, anonyme, pauméIl faut croire au soleil en adorant la neigeEt chercher le plus-que-parfait du verbe aimer

Il faut vivre d'amour, d'amitié, de défaitesDonner à perte d'âme, éclater de passionPour que l'on puisse écrire à la fin de la fête

Quelque chose a changé pendant que nous passions

Lemesle - Reggiani


Mon plus grand désir d’acteur ? C’est de faire des films destinés à faire rire les enfants et les parents à la fois dans ce monde trop triste !

Louis de Funès

Il meurt lentement
celui qui ne voyage pas,
celui qui ne lit pas,
celui qui n’écoute pas de musique,
celui qui ne sait pas trouver
grâce à ses yeux.

Il meurt lentement
celui qui détruit son amour-propre,
celui qui ne se laisse jamais aider.

Il meurt lentement
celui qui devient esclave de l’habitude
refaisant tous les jours les mêmes chemins,
celui qui ne change jamais de repère,
Ne se risque jamais à changer la couleur
de ses vêtements
Ou qui ne parle jamais à un inconnu

Il meurt lentement
celui qui évite la passion
et son tourbillon d’émotions
celles qui redonnent la lumière dans les yeux
et réparent les cœurs blessés

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Muere lentamente quien no viaja,
quien no lee,
quien no oye música,
quien no encuentra gracia en sí mismo.
Muere lentamente
quien destruye su amor propio,
quien no se deja ayudar.
Muere lentamente
quien se transforma en esclavo del hábito
repitiendo todos los días los mismos
trayectos,
quien no cambia de marca,
no se atreve a cambiar el color de su
vestimenta
o bien no conversa con quien no
conoce.
Muere lentamente
quien evita una pasión y su remolino
de emociones,
justamente estas que regresan el brillo
a los ojos y restauran los corazones
destrozados.
Muere lentamente
quien no gira el volante cuando esta infeliz
con su trabajo, o su amor,
quien no arriesga lo cierto ni lo incierto para ir
detrás de un sueño
quien no se permite, ni siquiera una vez en su vida,
huir de los consejos sensatos…

Pablo Neruda


 

Emmenez-moi
 
Vers les docks où le poids et l'ennuiMe courbent le dosIls arrivent le ventre alourdiDe fruits les bateaux
Ils viennent du bout du mondeApportant avec euxDes idées vagabondesAux reflets de ciels bleusDe mirages
Traînant un parfum poivréDe pays inconnusEt d'éternels étésOù l'on vit presque nusSur les plages
Moi qui n'ai connu toute ma vieQue le ciel du nordJ'aimerais débarbouiller ce grisEn virant de bord
Emmenez-moi au bout de la terreEmmenez-moi au pays des merveillesIl me semble que la misèreSerait moins pénible au soleil
Dans les bars à la tombée du jourAvec les marinsQuand on parle de filles et d'amourUn verre à la main
Je perds la notion des chosesEt soudain ma penséeM'enlève et me déposeUn merveilleux étéSur la grève
Où je vois tendant les brasL'amour qui comme un fouCourt au devant de moiEt je me pends au couDe mon rêve
Quand les bars ferment, que les marinsRejoignent leur bordMoi je rêve encore jusqu'au matinDebout sur le port
Emmenez-moi au bout de la terreEmmenez-moi au pays des merveillesIl me semble que la misèreSerait moins pénible au soleil
Un beau jour sur un rafiot craquantDe la coque au pontPour partir je travaillerais dansLa soute à charbon
Prenant la route qui mèneA mes rêves d'enfantSur des îles lointainesOù rien n'est importantQue de vivre
Où les filles alanguiesVous ravissent le coeurEn tressant m'a t'on ditDe ces colliers de fleursQui enivrent
Je fuirais laissant là mon passéSans aucun remordsSans bagage et le c? ur libéréEn chantant très fort
Emmenez-moi au bout de la terreEmmenez-moi au pays des merveillesIl me semble que la misèreSerait moins pénible au soleil...
 
Charles Aznavour

 

 

Griechischer Wein

 

Es war schon dunkelAls ich durch Vorstadtstraßen heimwärts gingDa war ein WirtshausAus dem das Licht noch auf den Gehsteig schienIch hatte Zeit und mir war kalt, drum trat ich ein

Da saßen Männer mit braunenAugen und mit schwarzem HaarUnd aus der Jukebox erklang MusikDie fremd und südlich warAls man mich sahStand einer auf und lud mich ein

Griechischer Wein istSo wie das Blut der ErdeKomm', schenk dir einUnd wenn ich dann traurig werdeLiegt es daranDass ich immer träume von daheimDu musst verzeihen

Griechischer WeinUnd die altvertrauten LiederSchenk' nochmal einDenn ich fühl' die Sehnsucht Wieder, in dieser Stadt Werd' ich immer nur ein Fremder sein, und allein

Und dann erzählten sie mir von grünen Hügeln, Meer und WindVon alten Häusern und jungen Frauen, die alleine sindUnd von dem Kind das seinen Vater noch nie sah

Sie sagten sich immer wiederIrgendwann geht es zurückUnd das Ersparte genügt zuHause für ein kleines GlückUnd bald denkt keiner mehr daranWie es hier war

Griechischer Wein istSo wie das Blut der ErdeKomm', schenk dir einUnd wenn ich dann traurig werdeLiegt es daranDass ich immer träume von daheimDu musst verzeihen

Griechischer WeinUnd die altvertrauten LiederSchenk' nochmal ein, Denn ich fühl' die Sehnsucht Wieder, in dieser Stadt Werd' ich immer nur ein Fremder sein, und allei

 

Black / Udo Jurgens


"Deux choses sont infinies : l’Univers et la bêtise humaine. Mais en ce qui concerne l’Univers, je n’en ai pas encore acquis la certitude absolue."

(Albert Einstein)


 

Passer pour un idiot aux yeux d'un imbécile est une volupté de fin gourmet.

Georges Courteline


Oktober wind

Jeder noch so schöne Sommer ist vergänglich
Wenn ich seine Wärme auch bis Heute spür′
In den Strassen scheint die Zeit schon irgendwie so endlich
Und es dämmert schon ganz leicht um kurz nach vier
Ein paar Blätter treffen sich in einem Wirbel
Erste Wolken ziehen ungefragt schon auf
Bald geh'n Menschen viel zu schnell unter viel zu dunklen Schirmen
Denn der Herbst nimmt ohne Rücksicht seinen Lauf
Ein paar Hunde streunen noch um die Laternen
Letzte Sonnenstrahlen locken vor die Tür
Tief aus mir wird sich kein Sommertag entfernen
Denn die wärmsten davon führten mich zu dir

Oktoberwind, du wehst durch mein Gemüt
Was in Blüte stand, verblüht
Oktoberwind, wie Blätter, die in deinem Tanz verweh′n
Wird Vergangenes im Frühling neu entsteh'n

Wenn die Lichter mit den warmen Farben spielen
Bricht die Zeit der gold'nen Tage für uns an
An den Abschied von den viel zu hochgesteckten Zielen
Glaub′ ich nicht, weil nie ganz stirbt was man begann
Wenn der Donner sich auch manchmal ziemlich breit macht
Und die Blitze bleiben fast am Himmel steh′n
Hoff' ich doch, dank allem was mich gross und klein macht
Bis zum Winter werden Jahre noch vergeh′n

Oktoberwind, du wehst durch mein Gemüt
Was in Blüte stand, verblüht
Oktoberwind, wie Blätter, die in deinem Tanz verweh'n
Wird Vergangenes im Frühling neu entsteh′n

Oktoberwind, wie Blätter, die in deinem Tanz verweh'n
Wird Vergangenes im Frühling neu entsteh′n

 

Udo Jurgens

C'est une langue belle avec des mots superbes Qui porte son histoire à travers ses accents Où l'on sent la musique et le parfum des herbes Le fromage de chèvre et le pain de froment Et du Mont-Saint-Michel jusqu'à la Contrescarpe En écoutant parler les gens de ce pays On dirait que le vent s'est pris dans une harpeEt qu'il en a gardé toutes les harmonies Dans cette langue belle aux couleurs de Provence Où la saveur des choses est déjà dans les mots C'est d'abord en parlant que la fête commence Et l'on boit des paroles aussi bien que de l'eau Les voix ressemblent aux cours des fleuves et des rivières Elles répondent aux méandres, au vent dans les roseaux Parfois même aux torrents qui charrient du tonnerre En polissant les pierres sur le bord des ruisseaux C'est une langue belle à l'autre bout du monde Une bulle de France au nord d'un continent Sertie dans un étau mais pourtant si féconde Enfermée dans les glaces au sommet d'un volcan Elle a jeté des ponts par-dessus l'Atlantique Elle a quitté son nid pour un autre terroir Et comme une hirondelle au printemps des musiques Elle revient nous chanter ses peines et ses espoirs Nous dire que là-bas dans ce pays de neige Elle a fait face aux vents qui soufflent de partout, Pour imposer ses mots jusque dans les collèges Et qu'on y parle encore la langue de chez nous C'est une langue belle à qui sait la défendre Elle offre les trésors de richesses infinies Les mots qui nous manquaient pour pouvoir nous comprendre Et la force qu'il faut pour vivre en harmonie Et de l'Île d'Orléans jusqu'à la Contrescarpe En écoutant chanter les gens de ce pays On dirait que le vent s'est pris dans une harpe Et qu'il a composé toute une symphonie 

Yves Duteil


Le village s’endort en son nid de verdure,
Une vague fumée encore monte des toits,
Un indicible calme envahit la nature
Et gagne lentement la campagne et les bois.

Un grand nuage rouge égaré dans l’espace
Jette de longs reflets sur les cieux assombris,
Puis insensiblement il se fond et s’efface
Dans le vague brouillard des crépuscules gris.

Tous les vieux paysans assis devant leur porte,
Devisent sur leurs champs, sur le temps qu’il fera :
Le raisin claire un peu, la récolte est très forte ;
On aura de l’argent, lorsque l’hiver viendra.

Les jeunes filles vont promener sous les saules,
Marchant toutes de front en se donnant la main,
Tandis que les beaux gars aux robustes épaules
Malicieusement leur barrent le chemin.

Chacun voudrait pouvoir retenir sa chacune,
Ce sont de gais assauts qui n’en finissent pas,
De longs éclats de voix, des rires, et la lune,
Qui passe dans le ciel, sourit à ces ébats.

Et les bœufs tachetés, couchés dans l’écurie,
Ruminent lentement leur provende du soir,
Pendant que leurs grands yeux tout pleins de rêverie
Errent dans l’ombre épaisse et regardent sans voir.

Alice de Chambrier


“Si l'on bâtissait la maison du bonheur, la plus grande pièce serait la salle d'attente.
Jules Renard